mardi 11 août 2009

CORRIDA : VILLES DE CORRIDAS

Bonjour je pense que les images suffisent, et que je n'ai pas grand chose à ajouter !
Et nous sommes en 2009...
Cela demande reflexion....

"Chers amis de combat,

la lutte avance et il se passe de nombreux événements! Vous pouvez en retrouver quelques-uns sur notre site : www.anticorrida.com

1) 820 personnalités ont désormais signé pour l'abolition de la corrida. Parmi les plus récentes, Sandrine Bélier, nouvelle eurodéputée d'Europe Ecologie, et une forte percée des forces de l'abolition en Pays Basque grâce au formidable travail de Jenofa : des journalistes, des artistes, des écrivains, des élus dont plusieurs maires...
http://www.anticorrida.com/IMG/pdf/manifeste_7_aout_2009.pdf

2) Vous pouvez retrouver l'écrivain Christian Laborde lors de son dernier passage sur France 3 : http://www.anticorrida.com/actualites/intervention-televisuelle-de

3) Sur youtube, découvrez le très émouvant montage de Michel Camboulives : http://www.anticorrida.com/actualites/un-montage-sur-youtube-pour

4) La lutte avance dans la capitale Cévenole! A Alès, le député-maire nous reçoit et tient compte des demandes du CRAC. Courrier du maire visible sur notre site : http://www.anticorrida.com/actualites/ales-un-rendez-vous-fructueux

5) Et une quatrième ville qui se déclare anticorrida en France pour celles et ceux qui ne le savaient pas encore avec des précisions sur les conditions de cette formidable décision d'une commune de l'Aude : http://www.anticorrida.com/actualites/joucou-4eme-ville-anticorrida-en

Bonne lecture et à bientôt! "

Pour le CRAC Europe
Jean-Pierre Garrigues
Vice-président
Tél. 06 75 90 11 93


Je remercie Jean Pierre pour son combat !

dimanche 26 avril 2009

FEMMES SOUS EMPRISE


FEMMES BATTUES DETRUITES PSYCHOLOGIQUEMENT



Comprendre pourquoi afin de pouvoir réagir !





On n'a jamais autant parlé de la violence, jamais autant invité à la débusquer et à la combattre, et pourtant, si on considère la littérature psychiatrique générale, il est surprenant de constater qu'il existe peu d'écrits sur celle qui s'exerce dans le couple. Même si elle a toujours existé, on aurait pu croire qu'avec la montée du féminisme, les choses évolueraient et qu'une plus grande égalité entre les hommes et les femmes entraînerait moins de violence. Il n'en est rien.


De même, un certain adoucissement des mœurs dans nos sociétés occidentales aurait dû rendre plus sensible à ce phénomène ; des choses naguère permises sont aujourd'hui interdites. Pourtant, la violence n'a pas disparu, elle s'est seulement faite plus subtile. Partout on la condamne, mais cette condamnation morale de principe ne touche que sa part visible.


Derrière un pacifisme et même un angélisme de façade, nous laissons se perpétuer des violences majeures pour peu qu'elles ne concernent que les plus vulnérables, à savoir les femmes et les enfants.D'une façon générale, la violence est difficile à penser, ce qui explique que nous ayons du mal à la repérer. Nous ne voulons pas la voir en nous, même si, accepter notre ambivalence nous permettrait de mieux la combattre. Malgré notre vigilance, nous ne voyons, la plupart du temps, qu'après-coups ses premiers signes.En ce qui concerne les couples, ce problème est encore plus dérangeant. Nous avons du mal à croire que cette violence ordinaire se produit dans des familles ordinaires, que les hommes violents ne sont pas uniquement des brutes avinées.


On préfèrerait reléguer cette problématique aux marges, l'attribuer aux classes sociales défavorisées.Or, il existe des individus violents dans tous les milieux. Nous avons du mal à le croire, aussi, lorsque la violence est l'œuvre d'un notable, à plus forte raison de quelqu'un supposé protéger ou soigner, comme un magistrat ou un médecin, on préfère alors mettre en doute le témoignage de la victime.La violence dans le couple nous touche de si près que la plupart des réactions aux récits qu'en font les victimes sont excessives, soit dans le sens de la banalisation, soit dans le sens de la médiatisation outrancière.


Nous voulons continuer à croire aux stéréotypes du couple aimant, heureux, véhiculés par les médias. Au fond, nous avons peur de la violence qui sommeille en nous.Ce n'est que depuis les années 70, avec les actions des féministes que l'on a commencé à étudier l'impact de la violence conjugale sur les femmes. Jusqu'alors on hésitait à intervenir sous prétexte qu'il s'agissait d'une histoire privée. Encore maintenant, les fait divers des journaux peuvent nous donner à penser qu'ils s'agit d'un phénomène marginal, or il s'agit d'un véritable fléau social qui n'est pas suffisamment pris en considération.



Les chiffres, qui ne tiennent compte que des violences physiques parvenues au judiciaire, sont effarants. On considère qu'en France une femme est tuée tous les cinq jours par un partenaire violent physiquement, que deux millions par an sont blessées grièvement, et, d'une façon générale, en Europe, chaque semaine une femme est tuée par son compagnon. Les chiffres sont tels que certains parlent d'un terrorisme de genre, et d'ailleurs, la plupart des enquêtes spécifiques sur la violence conjugale ont été faite à la demande des ministères des droits des femmes ou de l'égalité des chances, sous la pression des ONG de femmes.Ce problème de santé mentale extrêmement destructeur est rarement débattu, et, malgré ses conséquences graves sur la santé des victimes, il n'est enseigné aux futurs médecins qu'à titre facultatif. Les études épidémiologiques sur la violence au sein des couples sont difficiles à réaliser pour deux raisons principales ; d'abord, les différents pays ne se sont pas accordés sur une définition commune incluant ou non la violence psychologique, ensuite, les réponses sont très difficiles à interpréter du fait de leur très grande subjectivité : une victime peut être complètement anéantie, détruite psychologiquement par ce qu'elle vit et ne pas être capable de le formuler.



En France, jusqu'à l'enquête Enveff, réalisée en 2000 par Maryse Jaspard et son équipe, les statistiques ne prenaient en compte que la violence physique. Certains intellectuels, comme Elisabeth Badinter, ont reproché à cette enquête de mettre sur le même plan violence physique et violence psychologique et par là même amener les femmes à se poser abusivement en victimes.Certes, des imprécisions sont possibles puisqu'il s'agit là d'un ressenti subjectif, mais nous verrons que non seulement il est impossible de parler de violence au sein du couple sans tenir compte de sa part psychologique mais que toute violence est avant tout psychologique. Le mérite de cette enquête a été de permettre une prise de conscience des femmes, les amenant à reconsidérer des situations qu'elles n'auraient pas d'emblée déclaré comme violentes.


Contrairement à ce qui est dit fréquemment, la violence conjugale n'est possible que parce que la société l'accepte en silence. On la tolère à condition que cela reste dans la sphère privée et ne trouble pas l'ordre public. Espérons qu'une autre approche est enfin possible.L'autre difficulté qu'il y a à analyser la violence dans le couple vient de la tentation de l'objectiver, c'est-à-dire de la rendre indépendante de la subjectivité des acteurs. Un premier obstacle vient du fait que ce qui est inacceptable en la matière varie d'une époque à l'autre, d'une société à l'autre, et bien évidemment d'un couple à l'autre. Le seuil de tolérance de chacun est fonction de son histoire et de sa sensibilité, mais nous verrons que ce seuil peut être modifié par la nature de la violence subie, et en particulier par la mise sous emprise.



Par ailleurs, certains actes ne sont pas condamnables sur le plan juridique, mais sont néanmoins destructeurs sur le plan psychologique et une grande violence peut se dissimuler sous une apparence de bienveillance ou derrière des bonnes paroles : « Je dis cela parce que je t'aime ».A l'inverse, certains actes paraissent violents et ne sont que des réactions défensives. Aussi, de crainte de se tromper ou sous prétexte de stricte objectivité, les témoins ou les intervenants préfèrent laisser faire. De plus, certains comportements sont prohibés et très clairement réprimés socialement, d'autres, au contraire, sont tolérés et le jugement moral à leur égard plus nuancé.



On différencie ainsi une violence réactionnelle de celle qui est « actionnelle ». La première serait justifiée car elle répond à une agression, (on vous insulte et vous réagissez en en venant aux mains), la seconde consisterait en une action délibérée servant à dominer et à faire souffrir l'autre.


Mais, nous verrons, en étudiant les profils psychologiques des agresseurs, que la plupart d'entre eux, même en l'absence de faits objectifs les disculpant, sont persuadés qu'ils ne font que répondre à une agression et qu'il n'y a donc chez eux aucune intention consciente de faire du mal. Une dernière difficulté, et pas des moindres quand on aborde ce sujet, vient de ce que le terme violence recouvre des réalités très différentes. Certaines théories tendent à assimiler violence et force. Dans ce cas, la première serait naturelle, biologique, propre à toutes les espèces animales. Cependant les animaux ne connaissent pas la violence, mais des mouvements de rivalité ou de prédation. Une autre confusion est souvent faite avec l'agressivité normale et ses manifestations visibles, la colère ou le conflit. Or, l'agressivité est une tendance naturelle et saine, même si elle peut entraîner frustration ou chagrin. Dans toute relation, et à plus forte raison dans une relation amoureuse, il y a de l'ambivalence et de l'agressivité qui se vivent à travers des conflits ou des affrontements. Il s'agit d'un phénomène positif, car, quand on n'est pas d'accord avec quelqu'un, argumenter, même de façon véhémente, est une façon de reconnaître l'autre, de tenir compte de sa réalité. Dans la violence, au contraire, l'autre est empêché de s'exprimer, il n'y a pas de dialogue. Il est nié dans son intégrité.Trop souvent on ne voit du phénomène que sa partie visible, à savoir l'agression physique. Même si elle a été la première à être repérée puis dénoncée, celle-ci ne constitue qu'un aspect du problème, la partie émergée de l'iceberg. Tout commence bien avant les bousculades et les coups, et, comme on va le voir, il y a, au départ, des comportements abusifs, des intimidations, des microviolences qui préparent le terrain.


En parlant de « femmes battues », on occulte l'essentiel de la problématique. Dans la réalité, il est impossible de faire une distinction entre violence psychologique et violence physique car, quand un homme tape sa femme, son intention n'est pas de lui mettre un œil au beurre noir, mais de lui montrer que c'est lui qui commande et qu'elle n'a qu'à bien se tenir. L'enjeu de la violence est toujours la domination. Dans la maltraitance conjugale, les attaques psychologiques sont les plus dangereuses ; elles font tout aussi mal que les agressions physiques et ont des conséquences plus graves, toutes les victimes le disent. Il y a d'ailleurs des formes de violence où le partenaire, sans porter le moindre coup, réussit à détruire l'autre. Nous allons donc nous efforcer d'analyser ces processus car, si on veut diminuer les chiffres effarants de la violence conjugale, il faut intervenir dès ses premiers signes, c'est-à-dire bien avant l'apparition de l'agression physique.Parce que nous utilisons habituellement le même mot pour en parler, il est très difficile de distinguer la véritable violence, qui est parfois appelée abus et qui se pratique le plus souvent à bas bruit, des formes d'agressivité qui apparaissent dans un conflit de couple. Dans ce qui n'est qu'un conflit, même s'il peut y avoir éclats de voix, de la vaisselle cassée, et même des bousculades, il existe quand même une relation égalitaire, une symétrie entre les deux partenaires.Ce qui permet de distinguer la violence conjugale d'un simple conflit de couple, ce ne sont pas les coups ou les paroles blessantes mais l'asymétrie dans la relation.


Dans un conflit de couple, l'identité de chacun est préservée, l'autre est respecté en tant que personne, ce qui n'est pas le cas lorsque l'enjeu est de dominer et d'écraser l'autre.Pour faciliter la compréhension, j'utiliserai autant que possible le terme violence pour décrire le phénomène de fond, et agression lorsqu'il s'agit d'un fait ponctuel.Face aux récits parfois terrifiants des violences subies par certaines femmes, beaucoup s'étonnent de les voir rester et en concluent hâtivement qu'elles consentent à ce traitement. Même si, dans d'autres contextes, on connaît bien le processus d'emprise et de conditionnement, quand il s'agit des femmes en couple, certains psychanalystes continuent à dire qu'elles ressentent une satisfaction d'ordre masochiste à être objet de sévices.Il faut que ce discours aliénant cesse, car, sans une préparation psychologique destinée à la soumettre, aucune femme n'accepterait les abus psychologiques et encore moins la violence physique.



En réalité, il n'est nul besoin d'utiliser la force pour assujettir autrui, des moyens subtils, répétitifs, voilés, ambigus, peuvent être utilisés avec tout autant d'efficacité. Ces actes ou mots sont plus évocateurs que ne le serait une agression directe qui serait reconnue comme telle et entraînerait une réaction de défense.Nous allons essayer de comprendre ces processus de conditionnement et nous verrons qu'ils s'apparentent aux lavages de cerveau réalisés sur les prisonniers politiques ou dans les sectes. Nous étudierons les processus d'emprise qui paralysent les femmes, les empêchent de quitter un conjoint violent, les amènent à tolérer l'intolérable. En analysant les constantes des différentes formes de violence conjugale, nous verrons comment les femmes se font piéger.



Plutôt que de parler de femmes battues ou de violence de genre, comme cela se fait en Espagne, je préfère, quant à moi, m'en tenir au terme de violence de couple car, nous le verrons, cette violence s'applique aussi bien dans les couples homosexuels. Il s'agit avant tout d'une maltraitance qui se produit dans l'intimité d'une relation de couple, quand l'un des partenaires, quel que soit son sexe, essaie d'imposer son pouvoir par la force.C'est la proximité affective qui crée la gravité de cette violence ; là où circulent les affects les plus forts peuvent émerger les souffrances les plus intenses. C'est une domination du plus fort sur le plus faible, et, bien évidemment, la femme est culturellement la plus faible. La violence peut être exercée par un homme à l'égard d'une femme, par une femme à l'égard d'un homme ou par n'importe quelle personne à l'égard de son partenaire dans un couple homosexuel, néanmoins, pour des raisons qui tiennent à la structure même de la société, celle qui est exercée à l'égard des femmes est de loin la plus répandue.Dans 98% des cas recensés, l'auteur en est un homme. C'est pourquoi nous parlerons essentiellement de ce qui est le plus fréquent, à savoir la violence d'un homme à l'égard d'une femme, tout en sachant que des situations inverses peuvent exister.


Pour expliquer que les hommes sont incontestablement plus violents que les femmes, les féministes se sont attachées à analyser le contexte social permettant cette occurrence. Selon elles, la société prépare les hommes à occuper un rôle dominant et, s'ils n'y parviennent pas naturellement, ils tendent à le faire par la force. La violence serait pour eux un moyen parmi d'autres de contrôler la femme. Ceci est partiellement vrai, mais n'est pas suffisant pour expliquer la violence dans le couple. On ne peut la réduire à un phénomène culturel et social ; elle comporte aussi des éléments psychologiques.D'autres modèles explicatifs, contestés par les féministes, se sont intéressés à la personnalité des hommes violents. Ces différentes approches ne sont pas antagonistes. A l'origine de la violence domestique, on trouve à la fois des facteurs sociaux et une vulnérabilité psychologique. Cependant la vulnérabilité psychologique, sans la facilitation apportée par le contexte social, ne suffit pas à rendre un homme violent car le profil psychologique d'un individu est influencé par son éducation et son environnement social.Le discours actuel dénonçant la violence faite aux femmes peut être dangereux s'il n'est pas nuancé, car il tend à opposer hommes et femmes.



Il ne sert à rien de creuser encore plus le fossé entre les sexes et de considérer toute la population masculine comme potentiellement violente. S'il faut tenir compte de la violence psychologique, il ne s'agit pas non plus de la judiciariser. Il serait plus utile de lutter contre les mentalités sexistes des hommes, d'éduquer les garçons à respecter les filles et de libérer les deux sexes des stéréotypes qui leur sont attribués.Il est essentiel que les femmes apprennent à repérer les premiers signes de violence et à les dénoncer, non pas pour nécessairement porter plainte en justice, mais pour trouver en elles la force de sortir d'une situation abusive. Comprendre pourquoi on tolère un comportement intolérable, c'est aussi comprendre comment on peut en sortir. C'est par une compréhension fine des ressorts de la violence qu'elles subissent que les femmes se dégageront de l'emprise qui les paralyse et que notre société pourra mettre en place une prévention.

Mais pourquoi ne part-elle pas ?


Si j'étais à sa place, je sais bien ce que je ferais...


Qu'est-ce que l'emprise ?


L'emprise est un système de domination psychologique mis en place par une personne sur une autre personne. On peut se retrouver sous l'emprise d'un parent, d'un conjoint, d'une personne ayant autorité sur nous (ex. professeur), etc. Le but de l'agresseur qui exerce une emprise sur nous est de nous conditionner à répondre à ses attentes sans aucune considération pour notre libre-arbitre ni pour notre bien-être. Lorsque nous sommes sous emprise, nous effectuons les ordres qui nous sont donnés sans même plus penser à vérifier si ces ordres sont dans notre intérêt. Le plus souvent, d'ailleurs, ils sont totalement opposés à nos intérêts. Nous nous retrouvons alors dans la situation où nos propres comportements nous sont nuisibles. C'est un peu comme si l'agresseur, au lieu de nous faire du mal directement, nous donnait l'ordre de nous faire du mal à nous-mêmes. D'où le sentiment de culpabilité que développent certaines victimes et l'impression qu'elles ont d'avoir été les complices de l'agresseur.Lorsque nous sommes sous emprise, notre bien-être, notre protection, notre estime de nous, notre identité n'ont plus lieu d'être.



Nous sommes au « service psychique » de la personne qui nous contrôle. Ce qui est bon pour elle devient ce qui est bon tout court. Ce qui est bon pour elle devient la référence à laquelle nous mesurons ce qui doit être fait. Si c'est bon pour elle, c'est bon pour nous. Si c'est ce qu'elle souhaite, c'est ce que nous souhaitons. Si c'est ce qu'elle dit, c'est ce que nous disons. Si c'est ce qu'elle ressent, c'est ce que nous ressentons.


Notre propre individualité, nos propres sensations, nos propres choix disparaissent devant ceux de l'agresseur. Nous appréhendons le monde (idées, sensations, projets) à travers la perception du monde de l'agresseur. Notre cerveau n'est plus relié à nos sens, nos émotions, notre corps, notre sexualité. Il est directement relié (comme s'il y avait court-circuit) aux sens, aux émotions, au corps, à la sexualité de l'agresseur. Nous existons à travers l'agresseur. Quelques exemples d'emprise : une jeune fille abusée sexuellement par son oncle demande elle-même à ses parents d'aller passer ses week-ends chez cet oncle ; une femme battue par son compagnon explique que son mari n'est pas méchant, que c'est elle qui est maladroite et tête en l'air, et qu'il faut bien la corriger quand elle fait des bourdes ; une personne victime de mauvais traitements (privations de sommeil et de nourriture) dans le cadre d'une secte explique que c'est parce que c'est le seul moyen de se purifier et d'être enfin à la hauteur des espoirs que le gourou a placés en elle. Dans une moindre mesure, et toutes proportions gardées par rapport aux exemples précédents : une femme renonce systématiquement à toutes les occasions de promotion qui s'offrent à elle dans son travail car, à chaque fois, son mari lui fait remarquer que cela serait un poids trop lourd à porter pour elle et qu'elle n'y arriverait pas.



Toutes les situations du type des trois premières évoquées ci-dessus éveillent dans notre tête, quand on nous raconte l'histoire, la même sensation immédiate : « Mais pourquoi ne fuit-elle pas ? » C'est le premier réflexe que nous avons à l'écoute de tels récits. Pourquoi la jeune fille va-t-elle chez son oncle quand il lui suffirait de rester tranquillement chez ses parents ? Pourquoi la femme battue (dont nous supposerons qu'elle a des moyens financiers, des ami-e-s, des ressources et pas d'enfant à charge) retourne-t-elle chez son compagnon quant elle pourrait partir loin de là ? Pourquoi les gens dans cette secte acceptent sans broncher de ne manger chaque jour qu'une tartine de pain piétinée par un gourou ? Immédiatement, nous avons toutes la même seconde réaction : « Si c'était moi, je sais bien ce que je ferais ! » Si c'était moi, je lui en collerais une, à cet oncle ; je le dénoncerais aux flics, ce conjoint ; je lui mettrais le nez dans son pain piétiné, à ce gourou ! C'est ça l'emprise.



C'est à la fois une personne totalement soumise à des ordres arbitraires, absurdes et dangereux - et un entourage qui, lorsqu'il constate les faits, ne comprend tellement pas pourquoi la victime ne s'enfuit pas qu'il la soupçonne, à fortiori quand les agressions sont sexuelles, d'y « trouver son compte ». Si elle reste, c'est qu'elle aime ça, c'est que ce n'est pas si grave, c'est que ce n'est pas si dangereux, c'est qu'elle est malade dans sa tête, etc. Non. Si elle reste, c'est qu'elle est sous emprise. Et si vous étiez à sa place, vous ne joueriez pas les Superman ou Superwoman. Si vous étiez à sa place, vous feriez la même chose qu'elle. La raison pour laquelle vous pensez à présent à la fuite (à cogner l'agresseur/dénoncer le mari/étouffer le gourou à coup de mie de pain), c'est parce que vous n'êtes pas sous emprise, donc vous avez la capacité de penser à vous. Vous vous identifiez à la victime et immédiatement vous discernez ce qui serait bon pour vous si vous étiez dans sa situation. Ce faisant, vous oubliez une chose : si vous étiez dans sa situation, justement, vous ne pourriez plus penser à vous. Vous ne pourriez penser qu'à lui. Parce que vos sensations n'existeraient plus. Rappelez-vous : votre cerveau serait court-circuité en direct avec le sien. Vous penseriez à travers lui.



Comment l'agresseur instaure-t-il l'emprise ? Il y a des dizaines de façons de tisser un lien d'emprise pour y emprisonner quelqu'un. En général, l'agresseur est malin : il choisit les méthodes qui fonctionnent le mieux avec la victime qu'il a sous la main, ou alors il choisit une victime qui réagira « favorablement » aux méthodes dont il dispose. Une méthode qui ne marcherait pas du tout avec vous marchera avec le voisin, et vice versa. Par ailleurs, l'emprise ne s'installe pas en trois jours. Il faut des semaines, des mois. Si, dès le premier jour, le gourou demandait à ses adeptes de se contenter d'une tartine de pain piétinée, nul doute qu'ils protesteraient. Au contraire, le processus est lent, progressif. Chaque jour, les exigences de l'agresseur augmentent un petit peu. Chaque jour, le noeud coulant se resserre autour du cou de la victime.



Voici quelques unes des techniques utilisées pour « brouiller » les pistes et vous faire tomber dans l'emprise. On instaure un rituel systématique dans votre vie de tous les jours : on vous dit toujours les mêmes mots, on fait toujours les mêmes gestes, sans cesse, sans cesse, pas pendant une semaine, mais chaque jour de chaque semaine de chaque mois... Exemple : les faits et gestes d'une femme sont systématiquement espionnés et corrigés par son conjoint.



A chaque mouvement qu'elle fait, il critique et corrige « voilà ce que tu aurais dû faire à la place ». Vous n'avez pas droit à vos émotions, a vos opinions. Si vous dites « je pense que » ou « je resens que » on (au choix) : se moque de vous / ne vous écoute pas / vous contredit / vous dit que c'est parce que « vous avez dû mal comprendre la situation », etc.Les pistes émotionnelles sont brouillées. Vous ressentez de la souffrance (qu'elle soit verbale, psychologique, sexuelle, physique) alors qu'au même moment, les messages qu'on vous envoie se prétendent « positifs ».


Exemple : un père bat ses enfants en leur disant : « Mais je fais ça pour ton bien / mais je fais ça parce que je t'aime / mais tu sais bien que c'est parce que je ne peux pas me contrôler / mais je te promets de changer, je vais faire un effort, etc. » De ce fait, tout est contradictoire entre les mots/messages reçus et les actes/violences subis. Du coup, vous risquez fort de décider de ne plus faire confiance à vos perceptions puisque tant de messages en conflit les uns avec les autres vous parviennent sans cesse. De la déconnexion d'avec vos propres émotions à la connexion aux émotions de l'agresseur, il n'y a qu'un pas.Vous n'avez pas droit à l'erreur alors que les autres autour de vous, si. A chaque erreur de votre part, il y a drame (violence, objets brisés, coups, insultes...) alors que si c'est l'autre qui se trompe, c'est jugé comme pas grave.Les échecs vous sont systématiquement attribués tandis que les succès reviennent à l'agresseur. Si vous avez réussi quelque chose (qui peut aller du projet professionnel à la recette de cuisine) c'est parce que l'agresseur vous avait bien expliqué comment faire, c'est une preuve de ses talents pédagogiques et non de vos compétences personnelles : il vous a bien briefé pour votre travail, il vous acheté les bons ingrédients pour votre recette.



A l'inverse, si votre agresseur échoue quelque part (de la compétition sportive à l'entretien d'embauche), c'est parce que vous n'avez pas su vous acquitter de votre rôle : vous l'avez insuffisamment encouragé, vous lui avez consacré trop peu de temps pour qu'il soit bien préparé.Enfin, dans les cas extrêmes, on casse votre rythme naturel de vie - réveils systématiques en pleine nuit, privations de nourriture, etc. - de façon à ce que vous n'ayez plus votre pleine lucidité. En fait, l'agresseur fonctionne à la façon d'un parasite. Il vous pompe constamment votre énergie, vous êtes obligé-e d'en fabriquer en quantité suffisante pour deux, tandis que lui-même ne produit aucune énergie du tout.Les conséquences de l'emprise sur la victimeSuite à cette mise en place de l'emprise, les réactions à l'intérieur de la victime sont principalement les suivantes. Honte, culpabilité, angoisse, etc.



Tout se passe comme si la partie encore « hors emprise » de la victime réagissait aux actes de la partie sous emprise en les condamnant. Ce sentiment dont je parlais plus haut et qui vous fait dire : « Si c'était moi, je sais bien ce que je ferais ! » lorsque vous entendez l'histoire, la victime le vit elle aussi de l'intérieur. « Si c'était moi, je sais bien ce que je ferais ! » dit la moitié « hors emprise » de la personne à l'autre moitié « sous emprise ». Malheureusement, cette partie hors emprise n'est plus assez forte pour lutter seule contre l'agresseur, elle n'est plus assez « nombreuse » si je puis m'exprimer ainsi. Elle n'a plus d'autre fonction que de faire culpabiliser la personne.



Abandon, défaitisme, soumission, sentiment de « à quoi bon », etc. « Pourquoi partirais-je aujourd'hui alors que je ne suis pas partie hier ? » se dit la personne sous emprise. « Après tout, aujourd'hui est à peine pire qu'hier. Après tout, je ne suis pas aussi maltraitée que d'autres. Après tout, ça pourrait être pire. » Physiquement, psychiquement, il est parfois moins douloureux de renoncer que d'organiser la « résistance ». Et où trouver l'énergie de se battre lorsque toute l'énergie qu'on fabrique est constamment pompée par l'agresseur ? Clivages, dissociations, déconnexions, etc. Pour ne plus subir les tumultes à l'intérieur d'elle-même (morceaux sous emprise et morceaux hors emprise, contradictions entre les émotions perçues et les émotions imposées par l'agresseur, etc.), la victime se clive - par exemple, il y a la « femme qui travaille et qui va au boulot le matin » et la « femme qui rentre le soir et qui subit les coups de son mari » - ou se déconnecte d'une partie d'elle-même - par exemple : « Ha ! Il peut continuer de me violer tant qu'il veut, de toutes façons, je n'ai plus de corps ». Toutes ces luttes internes contribuent à affaiblir la victime au lieu de la ressourcer. C'est précisément l'engrenage recherché par l'agresseur. Trop occupée à lutter contre elle-même, la victime n'a plus le temps de lui résister.



L'emprise peut continuer de se développer. Quitter l'emprise ... Il n'y a malheureusement pas de solution miracle pour tirer quelqu'un hors de l'emprise. Comme dans les sables mouvants, les méthodes les plus radicales ne sont pas nécessairement les mieux adaptées. Au contraire, mise au pied du mur et contrainte de choisir, la victime pourrait même se mettre à défendre l'agresseur (rappelez-vous, elle pense à travers lui). Le plus important est de réapprendre à la personne sous emprise à penser à elle, à penser par elle-même. Il faut lui redonner le goût du libre-arbitre. Il faut qu'elle ait à nouveau la possibilité de se dire : qu'est-ce que je veux, qu'est-ce que je pense, qu'est-ce que je ressens, qu'est-ce qui est bon pour moi ? La personne sous emprise n'est pas stupide. Dès qu'elle saura à nouveau penser à elle, elle sera capable de voir que ce qui lui convient est ailleurs que sous la domination de l'agresseur.



C'est ce retour à elle-même qui peut assurer la fin définitive de l'emprise. Un déménagement ou un changement de travail peuvent éloigner physiquement l'agresseur - mais il faut aussi qu'il y ait rupture du lien psychique, du fameux « court-circuit ». Il faut que la personne sous emprise puisse à nouveau se dire : à partir de maintenant, c'est moi qui décide de ma vie.




LES THEMATIQUES de Parents-Solo (P.S.)

Interview de Marie-France HIRIGOYEN, auteur de "Femmes sous Emprise" :




"P.S. Vous êtes psychiatre, psychanalyste et victimologue, spécialisée dans l'étude de toutes les formes de violences : familiales, perverses et sexuelles. Dans votre livre, " Femmes sous emprise, les ressorts de la violence dans le couple ", sorti en 2005, vous montrez que toute violence est avant tout psychologique. Comment cela peut-il être le cas pour la violence physique ? Il n'y a jamais de violence physique s'il n'y a pas eu, avant, de la violence psychologique. La violence physique, est une façon de marquer le corps et de faire effraction dans l'enveloppe corporelle, en voulant dire " ton corps m'appartient et je vais le soumettre si tu me résistes ". Il suffit d'une seule fois ou de suggérer, de menacer pour que la femme ressente la même chose que si le coup avait été porté. Ces gestes ne sont pas n'importe lesquels : pour une femme enceinte, les coups seront portés au ventre, pour une femme fière de son physique, ils seront portés au visage. Les hommes violents disent souvent savoir où frapper pour ne pas que cela se voit. La violence physique n'est donc pas que physique... La violence physique peut aussi être indirecte, par exemple le geste peut passer à côté, mais cela amène la peur. Le coup peut être retenu, en disant que la prochaine fois il ne le sera pas. La violence physique peut être très subtile, à tel point que certaines fois, la femme ne la considère pas comme telle (une femme qui est bousculée et qui tombe pourra dire qu'elle est tombée toute seule).



P.S. : La violence physique, " c'est l'empreinte qui permet de lire sur le corps l'acceptation de la soumission ", et cette violence peut être aussi sexuelle ? Dans la violence sexuelle l'enjeu n'est pas le sexe mais la domination. C'est une façon de dire : " ton corps m'appartient, et j'en fais ce que je veux". Trop souvent les femmes pensent qu'en couple elles ne peuvent pas refuser un rapport sexuel. Elles acceptent, se résignent. La violence sexuelle consiste aussi en des humiliations, par exemple par des pratiques sexuelles dégradantes. Ce peut être aussi un rapport sexuel imposé qui peut être considéré comme un viol. D'autres fois les femmes acceptent un rapport sexuel pour calmer un partenaire violent.



P.S. : Au-delà de la violence physique, il y a celle qui ne se voit pas : la violence perverse. Avec les exemples de couples que vous décrivez, des constantes reviennent : elle reçoit des reproches ou des insultes, il parle plus qu'elle devant les autres, se réapproprie ses idées, il met en doute sa santé mentale, il n'est aimable que lorsqu'il a besoin d'elle, il montre une distance froide qu'elle se reproche, etc. Les personnes " victimes" doutent-elles d'elles-mêmes au départ ou en viennent-elles à douter d'elles-mêmes ? La violence perverse est une forme de violence psychologique. Elle n'est pas à distinguer de la violence physique, mais plutôt de la violence cyclique. La violence cyclique est la plus fréquente chez les hommes impulsifs. La violence perverse n'est pas cyclique mais permanente, par petites touches, subtile. Dans ce cas, il n'y a pas de réconciliation sur l'oreiller, mais une tension permanente. Il y a rarement de violence physique, mais uniquement de la violence psychologique, extrêmement destructrice car il s'agit d'attaquer par des mots, l'intimité et l'identité d'une personne. Comme c'est très subtil, les victimes doutent : elles ne sont pas sûres que c'est de la violence et cela les amène à penser que c'est elles qui sont responsables. Un pervers suffisamment intelligent, peut amener n'importe qui à douter, pas simplement la conjointe. C'est un comportement qu'on retrouve dans différents contextes, et un pervers intelligent peut amener l'autre à douter de lui-même, même si il est affirmé. Il y a des pervers moins doués, moins intelligents, et dans ce cas, ils choisissent quelqu'un qu'ils peuvent manipuler. Un pervers narcissique sait repérer chez l'autre la faille qui va permettre d'entrer, or, nous avons tous une faille, fragilité, point faible. Le pervers va s'y infiltrer.



P.S. : Vous constatez que le manipulateur " peut en arriver à des comportements si contradictoires qui paraissent dénués de bon sens " : voulez-vous dire qu'il s'agit de personnes très perturbées, malgré les apparences ? Tous les manipulateurs ne sont pas des pervers, mais chez un pervers narcissique, notre mode de réflexion ne fonctionne pas. Ces personnes n'ont pas de sensibilité, elles ont développé leur intelligence au dépend de leur affectivité, c'est-à-dire qu'elle n'ont aucune affectivité, mais elles sont extrêmement intelligentes. Comme elles n'ont pas de scrupules à faire souffrir l'autre, elles n'ont pas de culpabilité. Leur but est de parvenir au pouvoir, d'être supérieur à l'autre. Ce mode de fonctionnement cache un grand vide intérieur : s'ils pouvaient se regarder, ils constateraient qu'ils n'auraient pas une bonne image d'eux-mêmes. Mais, comme ils ne peuvent pas se regarder, ils attaquent l'autre pour se rehausser.



P.S. : Vous notez que ces hommes sont la plupart du temps des gens très agréables en société, dont on ne pourrait soupçonner ce type de comportement. Comment expliquer cette ambivalence ? Ce sont des hommes hyper adaptés à notre société. Leur but est de réussir, ils sont stratèges, intelligents, séducteurs et efficaces puisqu'ils n'ont aucun scrupule. Donc ce sont des gens qui réussissent très bien et, vu de l'extérieur, ce sont des personnes merveilleuses. On dit à leur femme " quelle chance tu as d'être avec quelqu'un comme ça ! ". Mais pour se maintenir dans cette séduction, ils ont besoin d'écraser et de dominer quelqu'un. Tout le monde peut être un peu comme ça, mais les gens qui fonctionnent à peu près normalement ont des doutes sur eux-mêmes, de la culpabilité, du remords quand ils sont odieux avec quelqu'un. Ce type de personnes se rencontre de plus en plus fréquemment car nous sommes dans une société narcissique qui valorise la réussite immédiate, la réussite malgré les mensonges, les magouilles et les tricheries. On donne comme modèle à nos enfants que la réussite est dans ce fonctionnement là...



P.S. : Pouvez-vous me parler du syndrome de Stockholm ? Le syndrome de Stockholm a été décrit à partir d'une agression, à Stockholm : lors d'une prise d'otages dans une banque, les otages ont tous défendu les agresseurs quand la police a voulu les défendre. Une des otages a même épousé l'un des agresseurs, c'est le plus surprenant. Pourquoi se met-on du côté des agresseurs ? Quand on est en danger, quand notre vie dépend du ravisseur, on peut s'identifier à l'agresseur, fonctionner comme lui et prendre son parti pour se protéger. Le danger vient alors de la police qui veut libérer les otages, et on espère que l'agresseur va nous laisser en vie si on est gentil avec lui. Ce procédé là explique le fonctionnement du syndrome de Stockholm. J'en parle au sujet des femmes victimes de violence qui défendent leur agresseur - " il ne l'a pas fait exprès " - elles se mettent à penser comme lui pour le protéger et se protéger.



P.S. : Les 4 phases de la violence que vous décrivez - phase de tension, phase d'agression, phase d'excuse, phase de réconciliation - sont-elles systématiques ? J'y ai répondu partiellement plus haut car La violence cyclique, c'est la violence d'un agresseur impulsif. Les personnes narcissiques ne fonctionnent pas par cycles. Les agresseurs impulsifs vont avoir une tension intérieure liée à leur malaise interne, qui va faire qu'ils vont se sentir nerveux et angoissés. Eux ne le traduisent pas en angoisse, mais en irritabilité. Cette tension va passer dans le couple et, à un moment, l'agresseur va décharger cette tension sur la femme : ce sera une violence verbale, le cassage d'objets, la violence physique, et ils vont se rendre compte que ça les défoule. Après, ils craindront que la femme les quitte car leur fragilité vient aussi de leur peur d'être abandonnés. Ils vont donc se rapprocher de la femme avec des excuses, de la gentillesse, puis de la réconciliation. Ces cycles se répètent, mais toujours en s'aggravant. La femme devient de plus en plus tolérante car elle sait qu'en fin de cycle, il y a réconciliation, puisque, quand il veut, il peut être très gentil. La femme va devenir accro à cette violence car la violence promet une récompense, c'est un réflexe conditionné. L'homme va constater que, d'une part, cette violence lui fait du bien (il est détendu), et que d'autre part, il ne se passe rien (il n'est pas puni). C'est donc efficace et il va recommencer. Les cycles se font de plus en plus rapprochés, de plus en plus graves et la femme se protége de moins en moins.



P.S. : Cette violence psychologique n'est pas étrangère à la domination des hommes sur les femmes qui perdure, selon vous. La femme doit être " féminine ", l'homme est contraint d'être " performant" et " viril ", n'ayant pas appris à contrôler sa colère et sa jalousie. Pourtant, il semble qu'on fasse tout pour tendre vers la parité ? Il me semble que les rapports entre les sexes sont compliqués. Auparavant, la domination d'un homme sur une femme allait de soi. Actuellement, avec la libération des femmes, soit disant la parité, les femmes ont pu acquérir une autonomie, au moins sur le plan social. Elles sont de plus en plus autonomes, libres et se considèrent comme l'égal des hommes. Je trouve qu'il y a une résistance de la part d'un certain nombre d'hommes : la résistance peut être subtile (vis-à-vis d'une femme qui gagne plus, vis-à-vis d'une femme qui prend trop de décision dans la maison...), mais il y a beaucoup d'hommes qui se sentent fragilisés par l'autonomie de la femme. Ils ont l'impression de n'avoir plus leur place, ils sont vulnérables sans pouvoir l'exprimer, donc ils risquent de décharger leur tension par de la violence. C'est un double lien : on demande aux hommes d'être viriles, de réussir, d'être performants, et en même temps, ils sont fragilisés dans le monde professionnel. Les femmes sont ambivalentes : elles veulent l'égalité mais elles continuent à chercher des hommes protecteurs. Là, il y a un phénomène qui n'est pas simple. L'éducation reste à faire et il faudra peut-être une ou plusieurs générations pour y parvenir.



P.S. : Le choix amoureux se fait de façon complémentaire : un homme qui aura besoin de dominer saura choisir une femme paraissant soumise et dépendante, une femme émotive sera rassurée par un homme dont elle dépendra mais qui semblera la protéger : voulez-vous dire que chacun s'y retrouve, que la dépendance est réciproque ? Je considère que lorsque la dépendance est réciproque, il n'y a pas de problème. La définition de la violence, c'est quand quelqu'un impose à l'autre un échange qui ne lui convient pas sans qu'il puisse l'exprimer. Par exemple, une scène de ménage peut être très bruyante, mais chacun dit tout ce qui ne va pas. Tant que l'autre peut répliquer, il ne s'agit pas de violence, mais de conflit. Le conflit n'est pas de la violence. Une dépendance réciproque, ce peut être bien. Dans un couple où l'un domine dans un registre et l'autre dans un autre, c'est l'égalité. Les hommes et les femmes ne sont pas semblables et peuvent avoir des qualités complémentaires. On est attiré plus par les fragilités de l'autre que par ses réussites. La dépendance réciproque, complémentaire n'est pas du tout de la violence.



P.S. : Les pervers narcissiques - manipulateurs extrêmes, très adaptés socialement, hommes de pouvoirs, fins stratèges, se protégeant en étant insensibles aux émotions, considérant la femme comme une rivale à écraser - semblent les pires : comment en arrive-t-on là ? L'éducation reçue peut-elle expliquer cela ? On ne naît pas pervers, on le devient. Soit parce qu'on a été considéré comme un mauvais objet ou un objet sexuel, donc maltraité ou abusé sexuellement, soit parce qu'on a été idolâtré et qu'on n'a pas eu de limites. La perversion narcissique est une question de cadres et de limites. Sans cadres et sans limites, ces personnes empiètent sur l'autre et veulent un pouvoir illimité. Donc, la perversion narcissique se crée par une éducation malveillante ou une éducation sans limites.


P.S. : Selon vous, aucune personne sous emprise ne peut s'en sortir seule, sans une aide extérieure telle que psychothérapie. En revanche, pour les personnes manipulatrices, ce type d'aide extérieure ne serait d'aucune utilité. Rien n'est-il donc possible pour eux ? Dans le cas d'une personne sous emprise, plus elle a été victime longtemps, plus la violence a été grave, et moins elle peut s'en sortir seule. Elle a besoin d'être accompagnée pour s'autonomiser, pour sortir de ce lavage de cerveau. Il lui faut un " lavage de cerveau à rebours " pour qu'elle décode la violence. Pour les personnes manipulatrices ponctuelles, la psychothérapie peut aider, à condition qu'il y ait une demande. Pour les pervers narcissiques, ils n'ont jamais de demande puisqu'ils ont toujours raison et que les autres sont des imbéciles, à leurs yeux. On ne peut pas aider quelqu'un qui dit avoir raison de traiter telle personne de cette façon puisqu'elle le mérite. Quand ils viennent nous voir, c'est pour nous montrer que nous sommes des imbéciles, ou pour nous utiliser (par exemple, à la demande de la justice, ils viennent, mais uniquement parce qu'on leur a demandé). On ne peut rien faire avec ces personnes là.


P.S. : " Comment peut-on aimer quelqu'un et reconnaître que cette relation est destructrice ? " : que faire devant ce type de prise de conscience, qui s'exprime régulièrement sur www.parent-solo.fr ? Quels conseils auriez vous envie de donner à ces personnes ? Ce que j'ai envie de dire c'est que lorsqu'on aime quelqu'un, on ne peut pas le traiter de cette façon, et en même temps, il faut dire aux personnes qui subissent en disant " je reste parce que je l'aime " (ce qu'on entend souvent), qu'elles doivent arriver à dire " justement, parce que je t'aime, je ne peux pas accepter que tu me traites comme cela ". C'est-à-dire que pour se faire respecter, il faut d'abord se respecter soi-même. Il faut donc refuser tout comportement dans lequel il n'y aurait pas de respect. L'amour ne justifie jamais la violence. Quel que soit le type de violence, elle n'a aucune justification. "



Vous trouverez sur le net de nombreuses associations pour les victimes de violences dans le couple, en voici une :


http://asso-cevc.spaces.live.com